1999 : Stop La Violence !
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« À l’aube de l’an 2000 pour les jeunes c’est plus le même deal / pour celui qui traîne, comme pour celui qui file / tout droit », avaient prévenu les tontons de NTM sur leur quatrième album, dont nous ignorions à l’époque qu’il serait leur dernier. « De toute façon y a plus de boulot / la boucle est bouclée, le système a la tête sous l'eau / Et les jeunes sont saoulés. » Le 14 janvier 1999, un garçon de 22 ans est tué d'un coup de couteau dans un train, à Bouffémont (Val-d'Oise). Laisse pas traîner ton fils. Le journaliste Christophe Nick propose qu’un manifeste soit rédigé par des lycéen·e·s de banlieue et publié dans Nova Mag. Fort de dix règles susceptibles d’endiguer un mal qui ronge la société toute entière, le texte prend pour titre « Stop La Violence », inspiré par KRS-One – et ne parle pas que de règlement de comptes au pied des tours, mais aussi de violences sexuelles, conjugales et familiales. Canal+ s’en fait l’écho le jour de la sortie en kiosques, Le Monde et TF1 lui emboîtent le pas, médias et politiques s’emballent. Un documentaire télé sur le mouvement, dont le noyau dur provient d’une asso d’ados baptisée « Droit de cité » qui écrit des textes hip-hop dans un atelier, se prépare. Au moins trente jeunes, de Sarcelles, d’Argenteuil ou du XXe arrondissement de Paris, s’entassent dans nos studios. L’un d’entre eux souligne, pour expliquer la misogynie ordinaire : « Quand les rappeurs traitent les filles de pétasses et qu’on nous le bassine 24h/24 sur les ondes, forcément, il y a répercussion. » L’expérience se réitère toutes les semaines et un morceau est enregistré, avec un freestyle en béton d’une rappeuse de 18 piges nommée Diam’s.
Stop la violence, oui. Et partout si possible. En 1999, deux ados tuent treize personnes au lycée Columbine de Littleton, Colorado. Un pétrolier affrété par Total, l’Erika, fait naufrage au large de la Bretagne, souillant le littoral sur 400 kilomètres et causant la mort d’environ 200 000 oiseaux. Une nouvelle édition du festival de Woodstock, trente ans après l’apothéose du mouvement hippie, est ruiné par une série de viols et la destruction des lieux par le feu, par un public enragé. Le gosse de Sixième sens, mis en scène par M. Night Shyamalan, voit des morts partout. Les balles sifflent au ralenti mais nos vies sont des simulations d’après l’oracle de la Matrice des frères-bientôt-sœurs Wachowski. Une génération d’hommes déboussolés se retrouve dans des caves pour se défoncer la gueule et fomenter, sur les conseils d’un gourou schizophrène, un « Projet Chaos » censé rebattre les cartes du système – sujet du roman culte Fight Club de Chuck Palahniuk, devenu à son tour film culte réalisé par David Fincher. Car il y a de bonnes nouvelles, quand même. Fin de la guerre du Kosovo. Médecins sans frontières désigné prix Nobel de la paix. Solidarité Sida crée un festival de musique, Solidays, qui marquera les esprits. Cédric Klapisch embauche notre programmateur Loïc Dury pour la bande-originale de Peut-être, situé dans le Paris ensablé de 2070.
Et sur Nova, qui ouvre des fréquences à Angers et Montpellier ? De nouveaux noms ? Oui. Une jeune journaliste de Villeneuve-la-Garenne, Aline Afanoukoé, traque les bons plans « au-delà du périph’ » et Keziah Jones sur la piste du Rex. Antoine Blin, futur réalisateur-animateur-producteur-reporter « tout ça à la fois », débarque de l’Hérault avec des idées héroïques, tandis que Manu Le Malin continue de nous éclater les oreilles avec le hardcore de son émission Extrême Terror. Mais cette violence-là, d’accord.
Réalisation, mixage : Guillaume Girault.
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